J’appelle dispositif tout ce qui a, d’une manière ou d’une autre, la capacité de capturer, d’orienter, de déterminer, d’intercepter, de modeler, de contrôler, et d’assurer les gestes, les conduites, les opinions et les discours des êtres vivants
(…)
Alors que les normes européennes imposent à tous les citoyens ces dispositifs biométriques qui développent et perfectionnent les technologies anthropométriques (depuis les empreintes digitales jusqu’aux photographies signalétiques) qui avaient été inventées au XIX° siècle pour identifier les criminels récidivistes, la surveillance de nos cités en intérieurs d’immenses prisons.Aux yeux de l’autorité (et peut-être a-t-elle raison), rien ne ressemble plus à un terroriste qu’un homme ordinaire.
Plus les dispositifs se font envahissants et disséminent leur pouvoir dans chaque secteur de notre vie, plus le gouvernement se trouve face à un élément insaisissable qui semble d’autant plus se soustraire à sa prise qu’il s’y soumet avec docilité. Cela ne signifie pas que ce dernier représente en soi un élément révolutionnaire, ni qu’il puisse arrêter ou même seulement menacer la machine gouvernementale. Au lieu de cette fin de l’histoire qu’on ne cesse d’annoncer, on assiste bien plutôt à de grands tours pour rien de la machine gouvernementale …
Giorgio Agamben
Qu’est-ce qu’un dispositif ?
Rivages poche. 2007