Vers dix heures du matin, seul un ténu et mauvais bleuissement du ciel dénonçait la brume qui avait été.
Les traits de la ville renaissaient peu à peu tandis que glissait le masque dont elle s’était voilée. Comme s’ouvre une fenêtre, on vit se lever le jour déjà levé. On sentit un léger changement dans les bruits de tout ; d’autres sons firent ainsi leur apparition. Une nuance bleutée se glissa jusque sur les pavés de la chaussée et dans l’aura impersonnelle des passants. Le soleil, s’il était chaud, l’était encore humidement, et se trouvait visiblement filtrés par la brume déjà inexistante
Fernando Pessoa
Le livre de l’intranquilité
(de Bernardo Soares)
201. 10-11 septembre 1931
Christian Bourgeois Editeur 1999