Les peuples qui n’ont pas le goût des balivernes, de la frivolité et de l’à-peu-près, qui vivent leurs exagérations verbales, sont une catastrophe pour les autres et pour eux-mêmes (…)
Pour corriger leurs mérites, pour remédier à leur profondeur, il faut les convertir au Midi et leur inculquer le virus de la farce.
Si Napoléon avait occupé l’Allemagne avec des Marseillais, la face du monde en aurait été tout autre.
Pourra-ton méridionaliser les peuples graves ? L’avenir de l’Europe est suspendu à cette question. Si les Allemands se remettent à travailler comme naguère, l’Occident est perdu; de même si les Russes ne retrouvent pas leur vieil amour de la paresse. Il faudrait développer chez les uns et les autres le goût du farniente, de l’apathie et de la sieste, leur faire miroiter les délices de l’avachissement et de la versatilité.
… A moins de nous résigner aux solutions que la Prusse, ou la Sibérie, infligerait à notre dilettantisme.
Emil Cioran
Syllogismes de l’amertume
Gallimard.1952

l’heure de la pause (Marseille.1950)